Aller au contenu principal
Jean Roubier, L'équilibriste, École de Plein air Suresnes, 1935
Jean Roubier, L'équilibriste, École de Plein air Suresnes, 1935

Jean Roubier

Le fonds du photographe Jean Roubier, don de la famille Rager-Roubier en 2021, se compose d’environ 100 000 négatifs noir et blanc, de 2 499 planches contact, de tirages, d’archives et des ouvrages dans lesquels son travail fut publié.

Les objets

Donation
Jean Roubier, autoportrait préparant un appareil photographique
Jean Roubier préparant un appareil photographique
JEAN ROUBIER (1896-1981)
Découvrez les photos de Jean Roubier sur POP

En 2021, le fonds du photographe Jean Roubier a rejoint les collections de la Médiathèque du patrimoine et de la photographie par donation de la famille Rager-Roubier. Cet ensemble se compose d’environ 100 000 négatifs noir et blanc, de 2 499 planches contact, de tirages, d’archives et des ouvrages dans lesquels son travail fut publié.

Après un début de carrière dans la banque puis le commerce, Jean Roubier s’installa comme photographe à Paris, sa ville natale, et devint membre de la Société française de photographie le 23 octobre 1931. Son intérêt pour le médium serait apparu au moment de l’Exposition coloniale de cette même année. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, il entama une carrière de portraitiste, soutenu en cela par son ami l’écrivain Georges Duhamel (1884-1966), qui lui ouvrit les portes des célébrités de l’époque. Roubier immortalisa les protagonistes du monde littéraire et artistique de son temps. Gide, Carco, Duhamel bien sûr, Giraudoux, Henriot, Mermoz et bien d’autres furent photographiés dans des cadres intimistes ou officiels mettant en avant leur particularité professionnelle mais aussi leur humanité. Ces portraits illustrèrent des reportages parus dans diverses revues telles que Toute l’édition, Les Annales, La Revue du médecin, ou encore Ève. Durant cette période, Roubier intégra différents groupes français de photographes. En 1935, il rejoignit Alliance Photo, agence parisienne qui diffusait alors, entre autres, les reportages de Cartier-Bresson et Capa. En 1937, avec d’autres professionnels, il créa le groupe du Rectangle, association de photographes illustrateurs et publicitaires prônant une photographie française épurée.

L’entrée en guerre de la France contre l’Allemagne en 1939 vit ce vétéran de la Grande Guerre reprendre du service en tant que capitaine de réserve. Blessé au coude par une balle lors de la bataille de Bitche (Moselle) le 18 juin 1940, il fut fait prisonnier par les Allemands le lendemain. Libéré en octobre puis démobilisé en décembre, Roubier reprit son appareil photographique pour vivre. Refusant de travailler pour la presse collaborationniste, il mit entre parenthèses sa carrière d’illustrateur pour la presse au profit de commandes éditoriales. Il vécut surtout grâce au contrat signé avec la maison Alpina en 1936 et d’autres éditeurs dédiés à la publication d’ouvrages touristiques et artistiques. En août 1944, la Libération de Paris lui donna l’occasion d’endosser à nouveau le rôle de reporter.

 

 

En compagnie de Georges Duhamel, il battit le pavé de la capitale et engrangea des clichés montrant les combats de rue, le défilé des armées victorieuses, les Parisiens en fête, les prisonniers allemands. En 1946, deux volumes de L’Art français dans la guerre publièrent son reportage consacré aux dévastations du débarquement en Normandie.

Jusqu’à sa disparition, Jean Roubier poursuivit son travail d’illustrateur en continuant à répondre aux demandes des maisons d’éditions françaises et étrangères axées sur les ouvrages artistiques et architecturaux. Il s’attacha au patrimoine européen, avec, pour la France, un indéniable intérêt pour la photographie paysagère et ethnologique. Les clichés nous restituent les instantanés de métiers et de caractères régionaux sur le point de disparaître dans leur forme ancestrale, formant la mémoire visuelle d’un mode de vie avalé progressivement par l’avènement de la société des Trente Glorieuses.

 

 

 

 

Roubier ne se contentait pas de photographier lorsqu’il approchait un motif particulier, un être qui le touchait. Il cherchait le meilleur angle, la mise en valeur du sujet, une manière de mise en scène qui le rend unique, éloquent, sans négliger parfois la pointe d’humour du bon vivant. L’humain fut au cœur de son travail dans les décennies 1930-1950, mais un humain intégré au monde, en communion avec la terre, les animaux, formant un tout avec son cadre de vie.

 

De ce questionnement sur l’avenir social naquit la collaboration avec Georges Duhamel sur l’ouvrage L’Humaniste et l’automate, paru en 1933, et peut-être aussi l’inscription de son nom dans la longue liste des photographes dits humanistes. Ainsi que l’écrivait le critique Paul Sonthonnax, Jean Roubier eut le « souci permanent de rester un homme parmi les hommes, souci de chercher l’homme partout, de s’intéresser d’abord à l’humain qui fait, que, peut-être, les photos où l’on sent le mieux passer la personnalité propre de Roubier sont celles où l’homme apparaît, depuis l’écrivain auquel l’amitié le lie, jusqu’au visage du modèle vivant transparaissant dans la pierre ou le bronze ».

Toutes les images sont de © Donation Jean Roubier, ministère de la Culture (France), MPP, diff RMN-GP

Fatima de Castro, MPP, 2023

publication
Jean Roubier, Georges Duhamel jouant de la flûte traversière dans son jardin, 1930
Georges Duhamel dans son jardin, 1930
L’Humaniste et l’Automate : une collaboration artistique